Anamnèse :

Fidji est un épagneul de 3 ans en pleine forme, mais sa maitresse a remarqué depuis quelques jours une boursoufflure avec perte de poils juste au dessus de la truffe. Le prurit est modéré, la zone est enflammée (photo 1).

Kerion1
photo 1

Diagnostic :

Il s’agit d’une lésion nummulaire en relief, alopécique, légèrement érythémateuse et douloureuse.

L’examen à la lampe de wood s’est révélé négatif, de même que l’examen direct au microscope n’a pas permis déterminer l’agent causal.

Le diagnostic différentiel inclut le kerion (ou teigne infectée), la folliculite bactérienne, la démodécie, l’histiocytome, le mastocytome.

Des poils et squames sont prélevés en périphérie de la lésion et mis en incubation sur un milieu de culture approprié. L’examen de choix aurait été la biopsie mais a été refusée par sa maitresse. Elle sera inévitable si la lésion ne guérit pas.

 

Décision de traitement :

En attendant le résultat de l’ensemencement, un traitement antifongique, anti infectieux et antiparasitaire est proposé.

Le traitement des mycoses repose sur des antifongiques externes et internes, ce sont des molécules chimiques non dénuées d’effets secondaires surtout par voie orale (vomissement, diarrhée, hépatotoxicité..). Le traitement des infections bactériennes inclut des topiques antiseptiques et des antibiotiques oraux. La démodécie quant à elle implique des traitements plus contraignants et plus onéreux, elle est peu probable et non recherchée dans ce cas-ci.

Afin d’éviter des traitements inutiles ou des effets secondaires non négligeables et tant que le résultat de la culture n’est pas connu, il est proposé un traitement naturel tout de suite adopté: une solution topique aux huiles essentielles.

Une solution aqueuse à base d’huiles essentielles est appliquée à raison d’une fois par jour, tous les jours pendant 3 semaines. En raison de la proximité des narines et des yeux, il est appliqué par tamponnage de la zone avec un coton tige trempé dans le flacon.

 

Evolution :

La culture s’est montrée positive au kerion (ou teigne infectée), dès le 8ième jour (Photo 2).

Kerion2

 

Fidji s’est laissé appliquer le produit mais sa propriétaire a dû se faire aider de son mari pour le maintenir car l’odeur l’incommodait, dès qu’il voyait le flacon, il essayait de s’échapper ! Au bout de 3 semaines, il ne présente plus de lésion, le poil a déjà presque repoussé ! (Photo 3)

Kerion3

 

 

 

 

 

 

Discussion

Contre le kerion, la préparation utilisée contient 10% d’huiles essentielles les plus antifongiques : la cannelle de Chine (Cinnamomum cassia), le Palmarosa (Cymbopogon martinii var motia), le clou de girofle (Eugenia caryophyllus) et le tea tree (Mélaleuca alternifolia). Ce sont aussi de très puissants antibactériens ainsi que des antiparasitaires redoutables. Cette formule est idéale dans les affections cutanées plurifactorielles où parasite, bactérie et levure se côtoient. L’excipient est à base d’eau distillée (87,7%), le restant étant un solubilisant des huiles essentielles dans la phase aqueuse. La formule exacte reste évidemment secrète !!!

 

Les huiles essentielles

Depuis quelques années, il renait un véritable engouement pour les thérapeutiques dites « naturelles ». L’aromathérapie en fait partie et sa puissance d’action est indéniable. En effet, les huiles essentielles sont composées en moyenne d’une centaine de molécules biochimiques différentes (des phénols, alcools, aldéhydes, cétones, oxydes,sesquiterpènes, esters, terpènes, lactones, coumarines…), il n’existe dès lors pas de résistance connue aux huiles essentielles; aucune bactérie ou aucun virus n’étant capable de résister à autant de molécules en même temps! De nombreuses études ont démontré ces pouvoirs,

De la même manière qu’un antibiogramme, il est possible de tester les huiles essentielles face à un agent bactérien grâce à un aromatogramme : un laboratoire parisien le pratique de manière courante après avoir isolé l’agent causal de manière classique.

Les huiles essentielles sont des essences volatiles extraites des plantes aromatiques, le plus souvent par distillation à la vapeur d’eau à basse pression. D’autres extractions sont possibles comme l’ « expression » pour les agrumes ou l’ « enfleurage »pour les fleurs.

L’aromathérapie vétérinaire utilise les huiles essentielles de composition biochimique bien connue pour prévenir, soulager ou guérir de nombreuses affections. Elle peuvent être associée ou non aux thérapeutiques classiques. Pour cela, toutes les voies d’administration sont possibles : atmosphérique, cutanée, orale, nasale, auriculaire, rectale, vaginale.

Il est ainsi possible de mélanger différentes huiles essentielles afin d’obtenir une « synergie » plus efficace et plus large d’action.

 

Conclusion:

Est-ce la perte de confiance dans les traitements médicamenteux classiques ou un effet de mode, toujours est-il qu’il existe un véritable engouement pour les médecines dites « naturelles ». L’aromathérapie en fait partie et constitue une  alternative efficace. Ne laissons pas cette thérapie nous échapper et évitons l’automédication dans ce domaine car les huiles essentielles peuvent aussi s’avérer dangereuses. Etant les seuls spécialistes de la santé animale, nous nous devons de répondre aux attentes de nos clients.

 

Bibliographie :

« Guide pratique d’aromathérapie chez l’animal de compagnie »- Dr Pascal DEBAUCHE

« Huiles essentielles – 2000 ans de découvertes aromathérapeutiques pour une médecine d’avenir » de Dominique Baudoux

« Aromathérapie » du Dr Jean Valnet Éditions Maloine

 » L’aromathérapie – Se soigner par les huiles essentielles » de Dominique Baudoux

« L’Aromathérapie exactement » du P. Franchomme et Dr D. Pénoël

 » Les cahiers pratiques de l’aromathérapie française – « DERMATOLOGIE »  « SOINS PALLIATIFS »  de Dominique Baudoux